28/02/09
Jusqu'où irons-nous dans la détestation du monde qu'on nous a fait et que nous sommes bien contraints d'habiter ?
Notre amour du monde, qui ne peut que grandir, ne se résigne pas à la décomposition
.
L'argent, par exemple. Dieu maudit.
Qu'est-ce qu'on ne peut ni acheter ni payer,
parce que c'est irréparablement gratuit ?
L'amour.
L'amitié.
La confiance.
La foi.
La grâce.
Les sacrements.
L'intelligence.
Le ciel.
La terre.
L'air (...jusqu'à nouvel ordre).
La paix de l'âme.
Le goût de vivre.
Qu'est-ce qu'il faut généralement payer
et qui pourtant ne s'achète pas,
parce que ça n'a pas de prix ?
Le soin du mèdecin.
La parole de l'enseignant.
L'écoute du thérapeute.
Bach. Schubert. Ravel. Rembrandt. Vermeer. Shakespeare. Molière. Descartes. Bergson. Saint Augustin. Thomas d'Aquin, la Bible...et tous les autres !
Les rencontres.
Les groupements, associations, oeuvres communes.
Qu'est-ce qu'on paie et qui s'achète mais qui,
sans un peu ou beaucoup de ce qui ne s'achète pas,
vire à l'inhumain ?
La nourriture.
Le logement.
Le vêtement.
Tous les objets, et, spécialement les instruments de communication.
Qu'est-ce qui s'achète avec de l'argent,
sans états d'âme, parce que payer suffit ?
Tout ce qui se prostitue.
L'argent pur, c'est le pouvoir de dire à l'autre: fais ça, viens, donne; c'est-à-dire le pouvoir d'être enfin seul au monde, avec ses envies.
Il est vrai que toute gratuité menace la croissance et crée du chômage.
Ah ! Que notre pensée ait déjà le tranchant de la lame ! L'action suivra.
Maurice Bellet
La traversée de l'en-bas, Bayard, 2005, pp 142 à 144
http://alainindependant.canalblog.com/archives/2009/02/28/12756987.html