Désormais, les choses sont claires : nous sommes dans une vraie crise. Et pas seulement, comme beaucoup le disaient sans doute pour minimiser les choses, dans une récession.
Car la récession désigne un recul momentané d'activité, tandis que la crise - comme en 1929 - désigne une situation où la conjoncture tend spontanément à s'aggraver, par un phénomène d'interdépendance bien connu : moins de demande, donc moins de débouchés, donc moins de revenus, donc moins d'emplois, donc moins de demande...
Pour ceux qui en doutaient encore, les dernières prévisions de l'Insee pour le premier semestre 2009 tablent sur une baisse du produit intérieur brut (PIB) de 2,9 % à la fin juin. Ce qui signifie que, si la chute d'activité devait se poursuivre au cours du deuxième semestre, même à un rythme moins rapide qu'actuellement, nous pourrions terminer l'année 2009 avec une réduction d'activité de l'ordre de 4 % ! Et ceci alors même que la loi de finances, bouclée le 15 septembre dernier, prévoyait une croissance positive comprise entre 1,5 % et 2 %.
Même s'il est de tradition que le gouvernement tente de peindre la réalité en rose, ce qui aboutit en général à avancer des prévisions un peu surestimées, personne, à l'époque, ne pensait que la situation allait se dégrader aussi vite et aussi fortement : en neuf mois, on est passé d'une croissance de + 1,5 % à - 2,9 %, soit une révision à la baisse de 4,5 points. L'équivalent de 85 milliards d'euros de PIB - et peut-être davantage si le deuxième semestre 2009 ne marque pas un arrêt dans la baisse - manquera donc à l'appel du fait de la crise.
On en voit tout de suite les conséquences : ce sont de l'ordre de 25 milliards d'euros qui ne rentreront pas dans les caisses des organismes sociaux, de l'Etat ou des collectivités territoriales, à peu près autant qui ne seront pas versés en salaires nets. Bref, si ces prévisions devaient devenir réalité, se mettraient alors en place bien des éléments d'une sévère crise aux effets sociaux désastreux. C'est pourquoi il faut agir dès maintenant. Vite et fort. Non pas pour augmenter le pouvoir d'achat, mais pour l'empêcher de se dégrader encore plus fortement.
Malheureusement, le mal est déjà en partie fait sur le plan de l'emploi. Début juillet 2008, on comptabilisait (France métropolitaine seulement) 26,05 millions de personnes en emploi. Six mois plus tard, on en comptabilisait 82 000 de moins, et l'Insee estime que, au cours du premier semestre 2009, ce sont encore 300 000 emplois qui devraient disparaître. Ce qui ferait passer alors le chômage (au sens du BIT, c'est-à-dire des personnes sans emploi, n'ayant pas travaillé au cours de la semaine précédente [1] , recherchant activement un emploi et disponibles dans les quinze jours pour l'occuper) d'un peu plus de 2 millions (début du troisième trimestre 2008) à 2,48 millions, en progression de 430 000 personnes. C'est cette hémorragie qu'il faut faire cesser de toute urgence. Car avec les emplois qui disparaissent, ce sont des personnes qui perdent pied, parmi lesquelles certaines risquent de retrouver très difficilement quelque chose, en raison de leur âge, de leur formation ou de leur expérience professionnelle, notamment industrielle, difficilement utilisable ailleurs.

Denis Clerc
26 Mars 2009
Notes
(1) Ce qui élimine pas mal de demandeurs d'emploi, puisqu'environ un million d'entre eux ont effectué des activités réduites tout en étant inscrits à Pôle emploi. De même, les dispensés de recherche d'emploi ne sont pas considérés comme chômeurs au sens du BIT puisqu'ils n'effectuent pas de démarches de recherche d'emploi. <
Sourceu
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