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La crise : pas de solution… mais une résolution
▪ Tant le International Herald Tribune que le Financial Times indiquent que l’économie américaine traverse une période difficile. Tous deux pointent du doigt la confiance des consommateurs. Ces derniers hésitent à emprunter ou dépenser, disent les journaux, parce qu’ils n’ont pas confiance. Ce qu’ils n’ont pas, en réalité, c’est de l’argent. Ils n’ont pas assez d’argent pour continuer à dépenser autant qu’au plus fort de la bulle… et ils n’ont pas l’espoir d’en gagner plus.
“La morosité pèse sur l’économie américaine”, dit le Financial Times.
L’indice de confiance du Conference Board est à son plus bas depuis 40 ans.
Rien d’étonnant à ça. On trouve plus d’Américains au chômage aujourd’hui qu’il y a 40 ans (ou qu’à tout autre moment depuis). Jamais les prix de l’immobilier n’ont autant chuté. L’indice Case-Shiller met les prix des maisons près de 4% plus bas qu’il y a 12 mois. Si l’ensemble de l’inventaire immobilier US a une valeur d’environ 20 000 milliards de dollars… cela représente une perte d’environ 800 milliards de dollars sur l’année passée.
“C’était juste sur le papier”, pourriez-vous objecter. Mais c’est précisément sur ce papier que les baby-boomers américains comptaient pour financer leurs vieux jours. 70 millions d’entre eux sont censés partir à la retraite au cours des 15 prochaines années. Peu ont épargné assez. Certains se sont tournés vers les marchés boursiers pour obtenir l’argent dont ils avaient besoin ; d’autres comptaient sur la vente de leur maison.
(..)
Maintenant, ils sont dans le pétrin. Les actions et les maisons stagnent depuis 10 ans aux Etats-Unis. Ces années auraient dû être “le pic de l’épargne retraite” pour les baby-boomers… alors que leurs revenus atteignaient un sommet et que les plages de la Floride ensoleillée leur faisaient signe comme Lorelei sur les rives du Rhin.
Mais ils ont tout raté. Ils ont pris leurs hauts revenus… ont investi dans les actions ou l’immobilier… ou ont simplement dépensé l’argent. Et que leur reste-t-il à présent ?
Ils doivent faire des économies !
Le problème de l’épargne, c’est qu’elle est incompatible avec une économie saturée de dettes. Si vos revenus augmentent, vous pouvez racheter vos prêts avec l’argent supplémentaire. Vous n’enlevez rien à l’économie elle-même. Mais si vos revenus n’augmentent pas, vous devez mettre la main à la poche et en retirer de l’argent autrefois alloué à d’autres choses. Tout ça a une conséquence assez contrariante : ça réduit les dépenses de consommation… ce qui pousse l’économie dans la crise.
Actuellement, les autorités injectent de colossales quantités d’argent dans l’économie, augmentant encore les dettes du secteur public — mais la marée se retire pour tous les autres ou presque. Elle emporte avec elle des millions de ménages. Ils se noient désormais dans la dette, avec peu d’espoir de revenir un jour à la surface. Le mieux qu’ils puissent faire, c’est abandonner le fardeau des prêts immobiliers, prêts étudiants et autres cartes de crédit… toute la dette qui les ralentit.
Et ensuite ? Ensuite, ils devront réduire leurs dépenses… et vraiment épargner pour leur retraite. Inutile de vous dire ce que ça fait à l’économie.
▪ “Puisque si tu es si malin”, a déclaré notre moitié, “quelle est ta solution ?”
- “Je n’ai pas de solution”, avons-nous répondu. “Seulement une résolution”.
- “Laquelle ?”
- “Laisser les marchés se débrouiller. Laisser libre cours aux conséquences. Donnons une chance à la faillite”.
- “Mais ce sont les marchés qui nous ont mis dans le pétrin. Ce sont les marchés qui ont poussé les gens à s’endetter autant. Ce sont les marchés qui leur ont fait croire que l’immobilier grimperait éternellement. Ce sont les marchés qui ont récompensé Wall Street pour son ingénierie financière”.
- “Eh bien… Oui… Mais les marchés réagissaient à tout un tas de mauvais signaux et de désinformation fournis par les autorités”.
- “Peut-être… Mais si les marchés font des erreurs aussi gigantesques… comment peux-tu savoir qu’ils n’en referont pas d’autres tout aussi énormes ?”
- “Hé, les marchés ne savent jamais la valeur des choses. Ils font toujours des erreurs. Mais ils sont aussi toujours en train de découvrir la valeur des choses. Lorsqu’ils réalisent qu’ils ont été trompés, ils corrigent. Ils corrigent sans arrêt leurs erreurs. C’est pour ça que nous avons affaire à une Grande correction aujourd’hui”.
- “Mais comment peux-tu savoir que la correction vaudra mieux que l’erreur ?”
- “Tu poses des questions difficiles. On est censés être en vacances, là”.
- “C’est toi qui parles toujours de ces choses-là”…
- “Evidemment, on n’est jamais sûr de rien. C’est pour ça qu’on a les marchés. Ils ne savent rien eux non plus. Mais ils découvrent en permanence. C’est brouillon. C’est douloureux. Mais c’est comme ça”.
“Et quelle est l’alternative ?”, avons-nous continué. “Les Soviétiques ont essayé d’éliminer les marchés. Ils ont réuni des gens intelligents et les ont laissés décider de quelle manière le capital devait être alloué, qui obtenait quoi… et à quel prix. C’était la plus grande expérience économique jamais conduite. Ils s’y sont tenus, sur une période de 70 ans. Si les gens objectaient, ils les envoyaient en Sibérie. Certains ont essayé d’en sortir en sautant par-dessus le Mur de Berlin ; bon nombre d’entre eux ont été abattus par les gardes. Il faudrait en fait ériger un monument aux Soviétiques pour leur zèle constant et leur engagement sincère envers la cause de l’expérimentation économique. Peut-être devraient-ils avoir un Prix Nobel. Ils ont certainement fait plus que Krugman ou Keynes pour nous aider à comprendre comment fonctionnent les marchés. Des gens sensés auraient laissé tomber l’expérience après quelques mois. Mais les Soviétiques ont continué”.
“Aujourd’hui, nous savons. Sept décennies après avoir commencé, la Russie était plus pauvre. C’est tout le problème d’une économie commandée. Elle corrige elle aussi, mais vraiment à contre-coeur. Généralement après une révolution”.
“C’est ce à quoi nous assistons en ce moment. Le secteur privé — une économie de marché — corrige les erreurs commises durant les années de bulle. Il corrige sa dette. Il dénoue ses positions à effet de levier. Mais qu’en est-il du secteur public ? Le gouvernement est une économie commandée. Les décisions sont prises par des bureaucrates, des lobbyistes et des experts ès relations publiques. Les capitaux sont alloués en fonction de considérations politiques ; ils ne sont pas guidés par la main invisible des marchés — si bien que ces derniers ne corrigent pas. Ils font simplement la même erreur sans arrêt — accumuler de la dette — jusqu’à ce que la correction s’impose à eux”.
http://la-chronique-agora.com/la-crise-pas-de-solution-mais-une-resolution/
Pourquoi votre banque a besoin de VOTRE argent
Mory Doré
▪ Comment une banque trouve-t-elle sont argent -- le financement qui va lui permettre justement d'exercer son activité de banque ?
L'argent que vous déposez sur vos comptes est crucial pour une banque. Ce qu'elle redoute le plus, c'est que ses clients retirent massivement leur argent. (..)
Paris, Samedi 29 octobre 2011
Edition du week-end
Un empire est-il nostalgique ?
Françoise Garteiser
▪ Un empire est-il nostalgique ? Quand les choses commencent à se compliquer, quand ses opérations à l'étranger tournent mal, quand sa "mission" commence à le dépasser... l'inconscient collectif se souvient-il avec mélancolie de l'époque où tout était plus simple, où la suprématie était indiscutable et où l'on n'avait pas besoin de réaffirmer sans cesse -- comme pour se convaincre soi-même -- son importance dans la pyramide alimentaire mondiale ?
Les Etats-Unis, vacillants, fatigués de porter leur fardeau de dette qu'ils ne savent où poser, regrettent-ils l'ère où, en leaders mondiaux incontestés, ils envoyaient des hommes sur la Lune ? Peut-être qu'ils se souviennent surtout de la Guerre froide de l'époque, de l'assassinat de Kennedy, de Martin Luther King, de Robert Kennedy... et que cela renforce leur conviction qu'ils doivent tenir leur rang -- à tout prix.
Comme le disait Bill il y a quelques jours, "un empire ne recule jamais"... même si ça le mène droit à sa perte. En fait, c'est même son destin : l'ascension, la décadence et la chute, comme tout en ce monde.
▪ Et l'Europe, de son côté ? Cet amalgame d'anciens empires déjà passés par de nombreuses vicissitudes ? Sommes-nous vraiment convaincus de notre rang dans le monde ?
Le tissu rapiécé des "27" est en train de céder de toutes parts, tiraillé par d'anciens traumatismes et de nouvelles querelles. L'Allemagne semble être au coeur de tous les blocages ; nos voisins d'outre-Rhin ont gardé en tête la République de Weimar, et s'opposent fermement à toute tentative de faire marcher la planche à billets. Ce qui rend fous leurs partenaires, notamment français, qui ont des échéances électorales en vue...
Où est-ce que tout ça va nous mener ? Simone Wapler revenait dans L'Investisseur Or & Matières sur une inquiétante rumeur :
"De La Rue, une entreprise britannique, leader mondial dans l'impression de billets, aurait reçu une commande pour imprimer des 'nouveaux deutschemarks' selon une fuite d'un employé, postée sur un forum. Par ailleurs, dans un récent interview au Spiegel, Wolfgang Schäuble, ministre allemand des Finances, évoque la sortie possible de l'Allemagne de la Zone euro à mots à peine voilés".
"'Nous sommes confrontés à des événements que nous n'avions pas prévus', commence par dire Wolfgang Schäuble. Puis 'nous voulons sécuriser notre prospérité à long terme' après avoir évoqué le problème du vieillissement de la population. Et qui dit population âgée, vivant de rentes, dit population vulnérable à l'inflation.
"Dans cet interview sont ensuite évoquées l'inflation et/ou la guerre comme moyen d'éroder la dette. En final, le Spiegel pose la question d'une réforme monétaire (a monetary reform). Le mot 'monétaire' est très important, ce n'est pas 'fiscal'. Les Allemands sont des gens précis. Il ne s'agit donc pas de mesures budgétaires (faire rentrer des impôts, réduire les dépenses publiques, etc.). Ce à quoi à Wolfgang Schäuble répond : 'vous avez exactement décrit l'énorme défi historique que nous affrontons'..."
"Je peux me tromper", conclut Simone, "mais il me semble bien que ce Wolfgang Schäuble et l'Allemagne ont une idée derrière la tête : claquer la porte de l'euro si l'impression monétaire -- jugée suicidaire pour la prospérité à long terme -- est décidée".
Si c'est effectivement ce qui se passe, il n'aura pas fallu longtemps pour mettre fin au travail et aux idéaux qui ont fondé l'Europe.
Pardonnez cette Chronique un peu amère, cher lecteur : votre correspondante est née l'année où la Grande-Bretagne votait par référendum son maintien dans l'Union, a grandi dans une région qui sait assez ce que coûtent les déchirements entre voisins, et a pu goûter à l'enrichissement et aux libertés que permettent des frontières ouvertes entre nations. Le gâchis actuel, fruit d'années et d'années de démagogie et de mauvaises politiques, me laisse un drôle de goût dans la bouche.
Les empires ne sont pas les seuls à connaître nostalgie et désillusions.
Meilleures salutations,
Françoise Garteiser
La Chronique Agora
http://www.publications-agora.fr
http://www.la-chronique-agora.com
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Lire aussi sur le Liesi :
Les excès de l’euro et des marchés
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Votre argent ne vous appartient plus ! Une situation excessivement grave
Plusieurs lecteurs viennent de nous confirmer des faits extraordinaires qui se sont déroulés ces dix derniers jours.
Vous savez tous que le retrait par carte bancaire a été limité cet été. C’est ainsi que certains clients qui pouvaient retirer jusqu’à 2700 euros par semaine au DAB (distributeur automatique de banque) avec une carte haut de gamme sont désormais limités à la moitié !
De même, pour les utilisateurs de cartes classiques, la majorité des retraits a été divisée par deux !
On pouvait encore comprendre…
Cependant ces dix derniers jours, plusieurs lecteurs nous racontent leur mésaventure. Voici deux cas qui sont arrivés à plusieurs personnes.
Le premier a voulu retiré 30 000 euros en espèce dans une grande banque française cotée. On lui a fait comprendre qu’il n’était plus possible de retirer cet argent !
Il a souhaité retirer 10 000 euros et le discours a été le même. « Nous avons des ordres et nous n’avons pas la possibilité de vous donner une telle somme en espèces. »
<<Nous pouvons vous proposer un chèque de banque ou un virement, si vous souhaitez…>>
Pris de panique, le client a ouvert cinq comptes bancaires dans la même banque avec cinq cartes bancaires haut de gamme. Il pourra ainsi retirer son argent aux DAB en faisant cinq retraits par semaine. (Soit environ 1300 euros par semaine et par compte).
Il lui faudra donc plusieurs semaines pour récupérer SON argent.
Le second client a réussi à retirer 20 000 euros il y a dix jours environ dans une banque différente, cotée également. Pour chacun de ses retraits, il a du préciser à la banque la raison de ses retraits
Le client amateur d’art a précisé que c’était pour participer à des enchères.
Bien sûr, il nous a confié que c’était par crainte que son organisme financier fasse faillite dans les prochains mois.
Et oui nous explique t-il, parfaitement au courant de la situation: <<le fond de garantie est trop petit pour garantir une faillite bancaire. Il était de 2 miiliards il y a quelques mois. La garantie théorique étant de 100 000 euros par compte. Ce fond peut garantir 20 000 comptes environ. Ma banque a plus de 4 millions de comptes bancaires en France>>.
Sauf erreur de notre part, Nicolas Sarkozy n’a même pas parlé de ce fond lors de son discours et il est hors de question de nationaliser.
Ouf Super Mario arrive ! Sa console de jeu spéciale cash illimité pourrait prochainement indiquer « Same Player Shoot Again » puis « Game Over ».
Vous avez gagné une baguette d’une valorisation de 100 euros ! Insert one Napoleon !
Bref, pour revenir à notre lecteur, il reçoit un coup de fil de l’agence qui lui demande les factures de ses dépenses pour expliquer la raison de ses retraits !!!
Le client, fortement déçu, a eu l’impression de braquer la banque.
C’est bientôt la banque qui appellera l’ensemble de ses clients pour leurs dire « Rendez-nous l’argent, laissez-le sur votre compte, vous êtes cerné ! Cet argent est la propriété de la banque ».
Décidément c’est le monde à l’envers, même d’autres lecteurs qui avaient des FCPI n’ont pas réussi à revendre leurs parts au bout de trois semaines.
C’est clair, votre argent ne vous appartient plus !
Rien ne va plus, faites vos jeux !
Enfin les jeux sont faits: rouge, rouge, rouge et perd perd perd.
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Beaucoup d’entre vous m’ont écrit pour me demander ma vision des derniers évènements. Il est vrai que je manque de temps pour réaliser à la fois les études des billets et pour réagir quasi en direct pour commenter. Je prends le temps ce soir.
Enfumage, c’est le terme qui m’est venu spontanément hier matin sur BFM pour commenter l’accord européen qui venait à peine d’être signé.
Il est vrai que ce terme me trottait dans la tête après les dernières semaines de « bourrage de crâne » que nous avons subies.
La première étape a été le « SO-LI-DA-RI-TÉ avec la Grèce » et le « ne laissons pas tomber le peuple grec ». Bien entendu, le fait que ces propos soient généralement tenus par les mêmes gouvernements qui ont tendance à raboter les systèmes nationaux de solidarité doit alerter notre attention, et aiguiser notre esprit critique…
La deuxième a été la façon d’imposer à nos esprits l’association « Pas “d’aide à la Grèce” = Fin de l’euro = Fin de l’Europe » – ne manquait plus que le « = chute de vos cheveux ».
La dernière étape se joue devant nos yeux : le « nous avons sauvé l’euro, l’Europe, le monde, l’univers » (et vos cheveux…).
Avant de détailler cette savoureuse étape, je vais rappeler simplement le contexte.
La plupart des pays occidentaux ont vécu à crédit depuis des décennies. Un pays dans cette situation connaît des difficultés croissantes à contenir sa dette. Le retour à une situation saine exige donc de pénibles efforts, somme d’augmentation des recettes et la compression des dépenses, qui ont une influence récessive de plus en plus grande suivant leur importance.
C’est exactement ce qu’il faut faire en France pour retrouver des finances saines. MAIS, il y a une condition : c’est qu’il faut faire ceci en 1990, quand la dette est encore limitée. En 2010, c’est mort – c’est en tous cas mon analyse que je développe dans mon livre.
Illustrons la situation de la France (je développerai bientôt dans un billet) :
- dette publique = 50 % du patrimoine financier des ménages (= comptes courants + livrets A + assurance vie + actions + obligations…) ;
- dette de l’Etat = 8 années de recettes de l’Etat ;
- intérêts de la dette = 25 % des recettes de l’Etat ;
- (intérêts de la dette + amortissement de la dette) = 200 % des recettes de l’Etat (pour mémoire, votre banquier exige que ce chiffre soit inférieur à 30 %…).
Dans ces conditions, la spirale mortifère du surendettement est en route, et il n’y a plus rien à faire, si ce n’est restructurer la dette via un défaut partiel. C’est malheureux, mais c’est ainsi : c’est la conséquence de près de 40 ans de laxisme budgétaire, la facture arrive toujours un jour ou l’autre.
De plus, une règle simple, confirmée par des siècles d’Histoire, est que « moyennant suffisamment de temps, tout État finit par faire défaut » (1ère loi dite de Berruyer ). Depuis 1975, en 35 ans, 70 États ont fait défaut – 2 tous les ans en moyenne. La France fait défaut environ 2 fois par siècle – le dernier date de 1943… Arrêtons de dire que cela n’arrive jamais, c’est du rêve.
Or, qu’est-ce qu’une opération de crédit ? Imaginons que A prête 100 à B. Au terme du prêt, 2 hypothèses :
- soit B rend 100 à A, et dans ce cas là, l’opération a été totalement neutre et n’a enrichi ni appauvri personne (oublions les intérêts) ; les patrimoines sont inchangés.
- soit B ne rembourse pas, et dans ce cas là, A a perdu 100 et d’une façon ou d’une autre B a gagné 100. Cette fois, le prêt s’analyse simplement comme un don de A à B (don évidemment non volontaire…)
Ainsi, si B rembourse, tant mieux pour tout le monde, sinon, tant pis pour A – c’était de sa responsabilité de s’assurer que B pourrait le rembourser. Il a pris un risque (en vrai, il a même perçu un intérêt pour couvrir ce risque !), il est normal qu’il perde parfois… C’est le risque du crédit, personne n’oblige à prêter son argent.
Un défaut public entraîne simplement une réaffectation des patrimoines au bénéfice des plus pauvres, rien de plus. C’est évidemment une mauvaise solution (je ne dis nullement que c’est bien ou juste dans l’absolu, je ne me mets pas vraiment sur un terrain moral à ce stade), mais c’est souvent la seule disponible, comme dans toute faillite…
Ainsi, en mai 2010, la Grèce devait 350 Md€ à des investisseurs privés : banques, fonds d’investissements, particuliers… Si elle rembourse, tant mieux, sinon, tant pis pour eux – c’est ça le « libéralisme », à chacun d’être responsable…
Bien évidement, le défaut grec risquant de ruiner les gros possesseurs mondiaux d’épargne, les États se sont empressés de promettre « d’aider la Grèce » sous entendu « à payer ses créanciers pour ne pas les ruiner ». Car quand on donne de l’argent à la Grèce, l’argent n’est pas utilisé pour aider vraiment des grecs. Il repart immédiatement aux possesseurs d’épargne pour les rembourser. L’argent, les grecs l’on en fait perçu au moment du prêt initial, évidemment.
En caricaturant (ce que je n’aime pas trop, mais on nous abreuve de caricatures contraires), on peut dire qu’on nous promet 30 ans de souffrances pour rembourser l’épargne de Liliane Bettencourt et des autres grandes fortunes du pays. 70 % de la dette publique est in fine détenue par seulement 10 % de la population…
Ils ont donc, avec la complicité de la BCE, racheté de la dette grecque aux investisseurs. Ainsi, les pertes d’un futur défaut ne seront plus qu’en partie supportées par les investisseurs privés, le contribuable prenant à sa charge le solde des pertes. Ce qui est proprement scandaleux.
Il n’y a aucune raison de protéger l’investisseur obligataire, alors qu’on n’aide jamais l’investisseur en actions ou en immobilier face à des pertes – et c’est normal.
Et bien évidemment, si la Grèce fait défaut, ses prêteurs perdent leur argent, mais il n’y a aucun lien avec la “survie de l’euro”. Au pire, il fluctuera un peu à la baisse, mais aucune raison qu’il explose – c’est un autre sujet, sans lien direct. Cela revient à dire que si la Californie faisait défaut, le dollar exploserait – qui défendrait sérieusement ceci ? Robert Mundell, prix Nobel d’économie qui a créé la théorie des unions monétaires et est surnommé le “père de l’euro” a d’ailleurs dit en mai 2010 :
“Il faudra peut-être restructurer la dette publique d’un ou deux pays de l’euro affaiblis. Dans cinq ans, cela pourrait être inévitable, mais cela ne signifie pas l’éclatement de l’euro, cela signifie simplement une restructuration de dette.” [Robert Mundell, mai 2010]
De même, un éclatement de l’euro ou sa disparition serait un échec, mais ne signifierait en rien la fin de l’Europe – rappelons quand même que 10 pays sur 27 n’ont pas l’euro et qu’ils semblent survivre… Rien n’empêcherait d’ailleurs de relancer une union monétaire mieux construite.
Mais revenons à l’accord de cette nuit.
Qu’avons-nous lu et entendu, à part la magnificence de nos dirigeants ?
1/ que les banques « acceptaient librement » une décote de 50 % de leurs titres grecs. C’est exact, ce qui est faux est de dire qu’on efface 50 % de la dette grecque, car sur les 350 Md€ de dette :
- les 70 Md€ prêtés par la troïka ne sont pas concernés ;
- les 75 Md€ prêtés par la BCE ne sont pas concernés ;
- les investisseurs privés individuels non bancaires ne sont pas concernés.
Au passage, vous avez noté qu’on a expliqué que “la Grèce ne faisait pas défaut”, les créanciers acceptaient juste le sourire aux lèvres, “volontairement”, d’abandonner la moitié de leur créance, ce qui n’a évidemment RIEN À VOIR….
Restent donc environ 200 Md€ de cette grecque décotés de 50 %, soit 100 M€. Rapportés aux 350 Md€, la décote pour la Grèce n’est bien que de 28 %. Les banques et fonds de pensions grecs représentent une part importante de la perte ; comme ils vont devoir être nationalisés et recapitalisés, le défaut ne porte donc que sur environ 20 % de la dette. Insignifiant.
2/ la recapitalisation des banques. Estimée à 110 Md€, elle atteindra probablement le double. Ce qui pourrait sembler être une bonne mesure de sécurité va surtout provoquer très logiquement une contraction du crédit.
En effet, on va augmenter le ratio « Fonds Propres / Crédits » exigé des banques. Comme les banques n’ont ni l’envie ni les moyens d’augmenter leurs fonds propres, elles vont tout faire pour diminuer le total des crédits… Effroyable vu les conséquences sur l’économie, mais logique.
C’est pour cela que je propose la dé-privatisation du secteur bancaire : l’État, mais également les acteurs de l’économie réelle (Medef, syndicats, chambres de commerce, élus locaux) doivent avoir leur mot à dire sur la gestion des banques, qui irriguent toute l’économie. Il faut être un idéologique pathologique pour ne pas voir qu’une banque n’est pas une entreprise comme les autres :
- d’elle dépendent toutes les autres entreprises ; c’est le cœur de l’économie pompant l’argent dans le pays ;
- on ne peut pas la laisser faire faillite, car elle emporterait les autres banques avec elle ;
- le contribuable garantit du coup son bilan.
Les États vont devoir aider les banques, ce qui va faire sauter des notes AAA.
3/ la BCE va continuer à acheter des dettes des pays GIPSI (je me refuse déontologiquement à les appeler PIIGS par respect, et je trouve cet acronyme plus joli).
En fait, elle va continuer à pourrir son bilan en créant de la monnaie, risquant d’alimenter la défiance contre l’euro et de relancer l’inflation.
C’est ce comportement irresponsable, interdit pourtant par les traités, qui met réellement en danger l’euro.
Ma positon est contraire à celle de l’extrême gauche sur ce point, mais je considère que la monnaie (en général, pas forcément l’euro) est un bien commun à protéger, c’est le ciment social. Je refuse que les irresponsables qui ont réussi l’exploit de mettre en faillite à la fois le système bancaire et les finances des États touchent à la monnaie et la détruisent.
J’aimerais qu’il reste quelque chose de solide dans cette histoire, afin que nous ne revenions pas complètement à la préhistoire en cas de gros pépin…
4/ le fameux fonds FESF dont on a porté la « force de frappe » (notez l’apparition ahurissante de ce terme sorti d’on ne sait où…) à 1 000 Md€. Ce chiffre gigantesque n’est toutefois qu’une petite partie des dettes.
Rappelons que le FESF est un fonds qui se finance sur les marchés pour prêter aux pays en difficultés, avec la garantie des autres. Il y avait 17 pays en garantie fin 2010, mais comme la Grèce, l’Irlande et le Portugal ont demandé l’aide du FESF, ils ne sont plus 14 à garantir. Plus cela va, moins il y d’États garants et plus d’États bénéficiaires…
Les dirigeants ont décidé hier qu’au lieu d’acheter 100 de dette publique avec 100 de fonds, le FESF allait se transformer en espèce « d’assureur », garantissant 20 % du montant des futures émissions. Ainsi, avec les mêmes 100, il garantira à cette hauteur un investisseur prêtant 500 – d’où le passage des 200 Md€ restant au FESF aux soi-disant 1 000 Md€.
On prend évidement les marchés pour des lobotomisés, puisque évidemment il n’y a pas un euro en plus de fonds publics en garantie suite à cet accord. C’est d’ailleurs ce qu’a voté le parlement allemand hier unanimement : « pas 1 € de plus pour le FESF » ce que les journalistes ont traduit par « unanimité au parlement allemand pour soutenir Merckel et le FESF » – on croit rêver…
Ah oui, cerise sur le gâteau. Réfléchissons :
- en 2007, François Fillon a dit que l’État était en faillite ;
- en bon gestionnaire, il a logiquement augmenté la dette de 50 % en 5 ans ;
- le même Etat garantit le FESF.
Question du bac : « Que vaut la garantie d’un État en faillite avancée ?». Réponse : rien.
Ainsi, les 100 de garantie du FESF sont virtuels, les États ne pourront jamais les verser – puisqu’alors, cet argent ne pourrait venir que de nouveaux prêts souscrits sur les marchés, qui par hypothèse ne voudraient plus prêter aux États…
Enfin, on ne connaît pas les détails. Car le besoin serait que ces « 1 000 Md€ » soient utilisés pour l’Italie. Or, s’ils l’étaient, l’Italie devrait passer du côté « État garant » à celui d’ « État bénéficiaire », ce qui chargerait la barque de la France et de l’Allemagne de 80 Md€ de plus à garantir…
Vous ne comprenez pas tout ? Normal, c’est du délire, nécessitant presque la camisole de force : les marchés hésitent à prêter à des États surendettés ; ceux-ci décident alors de créer un fonds à qui ils donnent leur garantie, fonds va emprunter à leur place sur les marchés permettant de continuer à faire grossir leur dette. Kafkaïen.
Tout va bien, il est parfaitement logique de combattre le surendettement avec plus de dettes encore…
Je souligne au passage le bourrage de crane « il faut plus d’intégration européenne ». C’est un débat d’enfumage. Intéressant, mais sans aucun lien avec la situation. On a 17 Etats surendettés, imaginer qu’en les fusionnant on a autre chose qu’un gros État surendetté est un doux rêve… Exemple : France déficit de 80 Md€, Allemagne déficit de 50 Md€, nouvel « État franco-allemand » déficit de 130 Md€ – en quoi a-t-on avancé dans la résolution du problème ?
Je ne parle même pas du petit détail qui est que les peuples sont contre… À vouloir faire l’Europe sans les peuples, on va finir par faire le fascisme avec les peuples…
Dernier point : l’appel à la Chine. Quelle belle idée que de chercher le soutien financier d’une dictature communiste revancharde sachant qu’on ne pourra pas la rembourser – cela confine au pur génie géostratégique… Il va être simple de négocier avec elle dans le futur…
« La main qui donne est au-dessus de celle qui reçoit. » [Napoléon Bonaparte]
Le Brésil a d’ailleurs fait savoir qu’il ne voyait pas pourquoi il « aiderait » l’Europe – sans doute un égoïste. À moins que cela ne soit lié au fait que 50 % de sa population vit dans des favelas, et qu’il veut peut-être garder son maigre argent pour sa population plutôt que de nous permettre d’acheter de nouvelles télés plasma…
Attendre des pauvres qu’ils aident les riches, c’est cela la nouvelle « solidarité » promue par le financiarisme. C’est pour moi une source de révoltes et des graines de haine semées dans le monde entier…
Bref, dans 1 semaine, 1 mois ou 1 trimestre, le réveil va être douloureux, mais nous avons l’habitude de ces « sommets palliatifs 100 % propagande » qui ne résolvent pas les problèmes de base – et pour cause…
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Nicolas Sarkozy veut mettre l'Europe toute entière à la diète
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VIDEO :
http://www.dailymotion.com/video/xl5gs9_le-president-explique-la-crise-economique-2011_news
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