Grèce : La stratégie du choc
Pour le gouvernement socialiste grec, le choix de vient de plus en plus cornélien: faut-il qu'il trahisse ses idées, et l'intérêt national, ou qu'il envisage la mise en faillite de son pays par les créanciers.
La BCE et le FMI ont nettement mis le couteau sous la gorge du Premier ministre Georges Papandréou. La première a menacé de ne plus accepter les obligations d'Etat d'Athènes comme collatéral. Les banques grecques seraient d'un coup dans l'impossibilité de déposer ces obligations auprès de la BCE pour obtenir des euros. Elles seraient ruinées d'un coup.Le FMI, lui, a laissé entendre qu'il pourrait ne pas apporter les milliards d'euros nécessaire pour que l'Etat grec puisse rembourser les emprunts arrivants à échéance en juin prochain. Les deux institutions pose la même condition: privatiser massivement , pour 50 milliards d'euros: tout ce qui vaut de l'argent doit y passer: la poste, l'électricité, les télécoms, les ports, l'immobilier... Non seulement l'Etat grec serait déshabillé, mais il s'agit d'une vente à l'encan, puisque devant être réalisée dans un temps très bref. La stratégie du gouvernement socialiste qui envisageait des privatisations à 50-50 serait balayée, au profit de la rapacité des marchés. Le Pasok, parti socialiste, est donc absolument divisé sur la question. Pour passer outre aux débats d'un gouvernement démocratique, un projet circule: forcer Athènes à confier les privatisations à une agence indépendante où siègeraient des "experts" non grecs. On en revient aux solutions que les "puissances "au XIXè siècle, la France en tête, appliquaient aux pays sous protectorat , comme la Tunisie ou le Maroc. C'est la "stratégie du choc" qui, comme l'expliquait l'essayiste Naomie Klein. consiste à profiter des crises pour imposer aux peuples les solutions ultra-libérales.
Pour le FMI et les institutions européennes, le masque tombe: il n'est plus question de permettre aux Grecs de passer la crise en évitant une trop grande purge sociale.
C'est aussi une impasse pour la France. Les autorités françaises avaient eu, au début de la crise grecque le bon réflexe: en proposant aux allemands de casser la spéculation. Il suffisait d'acheter un gros bloc d'emprunts grecs pour faire remonter les cours, prenant à revers les positions de spéculateurs qui pariaient sur la baisse. Les Etats ayant montré leur puissance, les marchés seraient aller spéculer ailleurs. Mais les Allemands ont refusé net. Depuis lors, l'Elysée tente de durer sans beaucoup de perspectives, car, avec le temps, la crise devient toujours plus difficile à dénouer. Exemple: la restructuration de la dette. A partir du moment où les Etats, donc les contribuables, ont accepté de prêter aux grecs, la question change de nature, puisqu'il ne s'agit plus seulement d'imposer des pertes aux seules banques, mais aussi aux citoyens européens. Cela risquerait de ruiner toute idée de solidarité entre les pays de la zone euro. Sortir la Grèce de la zone devient aussi chaque jour plus onéreux pour les Grecs (et moins pour les banques de la zone euro, qui ont commencé à se défaire). Et tant que la crise de la dette n'est pas résolue, le pays s'enfonce dans la récession. Un cercle absolument vicieux dont la bonne porte de sortie devient chaque jour plus difficile à trouver
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Tragédie grecque :
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Si la Grèce était l'Argentine, le FMI l'aurait déjà acculée à la faillite
Philippe Béchade
▪ Les banques françaises avaient soutenu la tendance vendredi, leur consolidation a au contraire pesé sur le CAC 40 ce lundi.
Les inquiétudes au sujet de la Grèce avaient été mises entre parenthèses sur des rumeurs d'assouplissement des directives de Bâle 3. Mais rien n'est résolu en ce qui concerne un refinancement par le FMI. La Bourse d'Athènes a d'ailleurs chuté de 2,5% hier après-midi.
A Paris, le CAC 40 s'effritait au final de 0,21% à 3 943 points (avec à peine 1,2 milliard d'euros échangés) à l'issue d'une séance totalement soporifique, bien à l'image de ce que les opérateurs prévoyaient dès vendredi. En l'absence des investisseurs américains et britanniques (en congé ce 30 mai), les initiatives ont été totalement gelées.
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▪ Le FMI vient de faire connaître, à la veille du week-end prolongé, son refus de verser sa quotepart de 3,3 milliards d'euros à la Grèce au mois de juin. Il attend des garanties d'un remboursement de ces sommes.
Le Premier ministre grec, Georges Papandréou, affirmait il y a 48 heures que si 12 milliards d'euros n'étaient pas débloqués au plus vite, la Grèce sera en faillite dès juillet prochain.
Et de préciser "qu'aucun salaire, aucune retraite et aucune obligation de l'Etat ne pourront plus être payés". C'est le classique défaut de paiement que tous les marchés redoutent -- et l'éventualité que tous les sherpas de l'économie européenne écartent catégoriquement.
La Grèce n'en serait pas à son premier coup d'essai. En effet, elle possède -- comme le rappelait récemment Yannick Hardy dans un article paru dans MoneyWeek -- le record du plus grand nombre de faillites dans l'histoire de l'Europe au cours des deux derniers siècles écoulés : 1826, 1843, 1860, 1893. Elle se retrouve ainsi à égalité avec le Portugal (tiens, tiens !) et juste derrière l'Espagne.
Mais le passé chaotique d'un pays ne garantit pas l'éternel retour (inscrit dans la roue du destin) des mêmes désastres politiques et humains. Sauf dans le cas des empires, lesquels se décomposent pratiquement tous de la même manière depuis le temps des pharaons -- Bill Bonner vous l'a déjà démontré à maintes reprises, et bien plus doctement que je ne saurais le faire.
Sauf que la Grèce nous inquiète vraiment depuis l'automne 2009. Tout ce qui a été accompli depuis 18 mois pour rétablir la situation n'est qu'un écran de fumée ; un écran destiné à gagner du temps, mais qui pèse tout de même 110 milliards d'euros, soit 20 Kerviel ou un AIG.
Un précieux temps qui a permis aux marchés de poursuivre leur ascension vers les sommets. Ce sont principalement certaines banques américaines qui en ont tiré le plus grand profit. En effet, elles détiennent le monopole de l'émission de CDS (assurance contre le défaut de crédit) sur les pays en déliquescence budgétaire, et plus précisément les PIGS.
▪ Nous n'allons pas revenir sur la récession qui frappe la Grèce ni sur ses menues difficultés budgétaires que vous connaissez par coeur. D'autres aspects -- beaucoup moins médiatisés de cette crise -- nous paraissent autrement plus significatifs et alarmants.
Nous avons le souvenir encore très précis de l'enchaînement des symptômes qui ont précédé la faillite de l'Argentine fin 2001. Outre une monnaie trop forte parce qu'arrimée (très artificiellement) au dollar, le pays fut victime d'une fuite massive des capitaux -- libellés en dollar naturellement. Cette fuite siphonna les réserves de change et les liquidités détenues par les banques locales.
Ce n'était pas l'argent du petit peuple qui désertait lâchement la mère patrie mais bien celui des grandes fortunes et des entreprises. Elles avaient compris que l'Argentine -- surendettée en dollar -- s'enfonçait dans une impasse. Le point de non-retour avait été franchi avec la perte d'appétit pour le risque des investisseurs internationaux et le renforcement du dollar suite aux événements du 11 septembre.
Lorsque l'Argentine fit défaut, pas moins de 150 milliards de dollars avaient été transférés à l'étranger. Mais le facteur déclenchant fut -- il est crucial de s'en souvenir -- le refus du FMI d'accorder un nouveau prêt de 1,3 milliard de dollars à l'Argentine, destiné à payer les intérêts de la dette devant être versés début 2002.
La justification du FMI fut de sanctionner une politique économique qu'il jugeait inadaptée. Ce qui est plutôt ironique étant donné que l'Argentine ne faisait qu'appliquer les directives édictées par ce même FMI au début des années 90 -- notamment l'arrimage au dollar devenu un choix mortel.
▪ A quoi assistons-nous aujourd'hui ? A la menace d'une défection du FMI si la Grèce ne brade pas volontairement ses actifs générateurs de cash et son stock d'or (que les Européens réclament en garantie) ainsi qu'à une fuite éperdue des capitaux détenus par les grandes fortunes helléniques.
Selon la Banque centrale grecque, pas moins de 38 milliards d'euros sont partis sous d'autres cieux l'an passé et le phénomène s'accélère en 2011. Certains retraits ont même plusieurs fois dépassé les 1,5 milliard d'euros en 24 heures. Ainsi, les banques locales voient s'évaporer leurs fonds propres de manière plus qu'alarmante.
Selon le secrétaire d'Etat au ministère grec des Finances, Dimitris Kouselas, pas moins de 280 milliards d'euros ont pris le chemin des banques privées helvétiques depuis 2003. Cela représente 120% du PIB de la Suisse, pour vous donner une idée de l'échelle des transferts.
Et ce n'est pas le seul paradis fiscal implanté sur le sol européen. On peut aussi mentionner l'Angleterre, où les plus gros contribuables grecs sont à peu près aussi à l'abri des investigations des fonctionnaires d'Athènes qu'au Lichtenstein, à Dubaï ou à Singapour.
La totalité des sommes transférées à l'étranger représente probablement plus que les 344 milliards d'euros de la dette grecque. Cette dernière pose d'insolubles problèmes à la troïka dépêchée par Bruxelles afin d'évaluer la situation à la veille d'échéances cruciales.
Si nous calquons le scénario des dernières semaines précédant le défaut de paiement de l'Argentine (et la destruction de 53% de la valeur des créances détenues sur ce pays) sur ce que nous observons depuis le début de l'année en Grèce, le diagnostic est sans appel. M. Papandréou a bien raison d'affirmer que son pays connaîtra une faillite avant le milieu de l'été.
Beaucoup de ses (riches) concitoyens l'ont déjà anticipée, les marchés l'ont pratiquement actée (avec des taux à deux ans à 27%) et une bonne partie du peuple grec semble la souhaiter.
Ils sont bien convaincus que 10 ans -- voire 20 ans en cas de reprofilage de la dette -- de sacrifices jamais suffisants et le pillage des dernières richesses négociables (aéroports, distribution d'électricité, complexes touristiques, loterie nationale...) ne suffiront pas à rétablir la situation, sauf à considérer que le malade doit mourir guéri.
Le jour du jugement dernier semble se rapprocher de façon si rapide que le rideau pourrait tomber sur la tragédie grecque (et le château de cartes européen) avant même la fin du troisième acte... oups, pardon : trimestre !
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Revoir la Stratégie du choc de Naomi Klein