Pour bien comprendre ce qu’est un CDS « à nu » (contrat d’assurance sur le défaut de paiement) faisons un parallèle avec l’assurance automobile : imaginez que vous puissiez vous assurer pour toucher la valeur des voitures de vos voisins au cas où celles-ci viendraient à brûler (rassurez-vous, c’est interdit par le Code des Assurances, contrairement aux pratiques de la finance dérégulée).
Imaginez maintenant que tout le monde contracte des assurances sur les biens d’autrui, que ces contrats soient ensuite revendus dans tous les sens, et que le risque augmente à tel point que plus personne ne puissent assurer son véhicule... avec de l’argent honnêtement gagné.
Pour s’assurer, tous doivent donc spéculer sur le commerce des contrats d’assurances, puis, comme ça ne suffit pas, certains mettent le feu aux véhicules des autres, ceux sur lesquels ils ont des contrats, pour toucher le jack pot. Peu à peu, tous deviennent des incendiaires, contraints et forcés par la loi du marché. La ville brûle.
Dès la crise des subprimes, les dirigeants européens,Angela Merkel et Nicolas Sarkozy en tête, avaient promis de réguler la finance en interdisant les CDS à nu. Les spéculateurs devaient trembler (ou rire ?) à l’écoute de ses fracassantes déclarations de guerre : « Sarkozy et Merkel veulent mettre les spéculateurs au pas : En pleine crise grecque, le président français, la chancelière allemande et Jean-Claude Juncker demandent une enquête sur certains produits financiers. Et menacent d’interdire la spéculation. » [1].
Cette vaine promesse avait été reprise par les eurodéputés le 7 mars 2011 [2], sans plus de suite. Récemment, Christine Lagarde expliquait que réguler la finance en interdisant ce genre de pratiques serait « contre-productif » élégante manière d’avouer tremper dans la magouille. (Christine Lagarde est spécialiste de ce genre d’aveu : elle expliquait aussi que la France avait gagné 300 millions sur le dos de la Grèce en prétendant l’aider)
Michel Barnier annonce aujourd’hui [3] vouloir « encadrer plus sévèrement les marchés financiers, en instaurant notamment des mécanismes automatiques d’interruption des échanges, selon le quotidien allemand Handelsblatt. » Un exemplaire quasi secret de proposition de directive Mifid (markets in financial instruments directive), circulerait sous les manteaux des « milieux autorisés », histoire de faire croire que l’UE oserait s’opposer aux banques. Ce serait très drôle si ce n’était pas si tragique.
[1] - Sarkozy et Merkel veulent mettre les spéculateurs au pas
[2] -Les eurodéputés poussent pour interdire les CDS à nu sur dette
[3] -L’UE veut encadrer les échanges électroniques sur les marchés financiers