Philippe de Woot, Lettre ouverte aux décideurs chrétiens en temps d’urgence, Lethielleux/DDB Desclée de Brouwer, 2009.
Lors de la conférence organisée par l’ADIC (Association chrétienne des dirigeants et cadres) le 4 février 2010 à l’église Saint-Etienne de Froidmont, Philippe de Woot (professeur émérite de l’UCL) a repris les principaux thèmes de son livre et a complété un certain nombre de ceux-ci en lançant des pistes de réflexion que nous reprenons ci-dessous.
« Je crois que nous sommes entrés dans une phase où la folie nous guette et la barbarie nous menace et c’est là que le cri prophétique devrait être poussé . »
« Un auteur récent disait que le Barbare est celui qui oublie son humanité. Notre système oublie son humanité. Notre système est un système mécanique. C’est un système froid, rationnel, sans cœur. »
« Je voudrais proposer l’idée que les dirigeants d’entreprise devraient avoir une vision nouvelle. Pour moi, l’entreprise nouvelle, ce serait trois choses :
- redéfinir sa finalité. Ce qu’on enseigne dans les écoles, c’est la pensée de Milton Friedman : le rôle social de l’entreprise et l’enrichissement de l’actionnaire. Définir la finalité de l’entreprise en termes financiers alors qu’on crée des produits, des biens, des services, un progrès, c’est une folie et c’est malheureusement ce que toutes nos business schools continuent à enseigner ;
- remettre l’éthique au centre du débat et au centre des décisions stratégiques ;
- élargir la concertation : les patrons éclairés font des partenariats avec des ONG, s’engagent dans la construction européenne, dans les réseaux de responsabilité sociale. »
La nouvelle entreprise serait celle qui rééquilibrerait autrement l’esprit d’entreprise, le leadership éthique et l’engagement politique au sens grec du terme, l’entreprise participant au débat public.
Dans le derrnier chapitre de son livre, qui s’ouvre par deux citations, l’une d’Ezechiel et l’autre d’Isaïe, l’ouvrage de Ph. De woot prend une dimension prophétique. N’est-il pas dans la droite ligne des textes évangéliques quand il dit : « La transformation de notre système économique ne se fera durablement que si les hommes et les femmes qui l’animent se sont eux-mêmes transformés », lorsqu’il interpelle les chefs d’entreprise : « Allons-nous nous laisser tenter par la démesure et l’orgueil prométhéen… ou resterons-nous conscients de notre fragilité, d’une fraternité à partager, compatissants, à l’écoute des autres… ? » ou lorsqu’il s’adresse à chacun d’entre nous : « Si l’on est chrétien, comment ne pas vouloir transformer notre système économique ? ». Et le livre se termine par un très beau texte de Dom Helder Camara, ce prophète des temps modernes qui, en paraphrasant le credo, dit ceci : « J’ose croire au rêve de Dieu même : un ciel nouveau, une terre nouvelle où la justice habitera. »
Geo REGNIER ? L’Entreprise et l’homme, année 2010, premier trimestre, 87e année, pp.28-29.
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